DÉCIDÉMENT, La Voix du Nord souffle le chaud et le froid : après s’être montrée inquiète le 31 octobre de l’apparition de nouveaux contresens près de la rue Faidherbe à Lille (lire l’article), puis rassurante (« Le contresens cyclable aurait du bon sens ») le 3 novembre suite à la réaction de l’ADAV, elle lance le 8 novembre une nouvelle campagne de dénigrement des mêmes contresens, en donnant une fois de plus la parole à des autorités médicales dont l’ignorance en la matière le dispute à la mauvaise foi.
Alors que les nouveaux aménagements lillois sont appréciés par l’immense majorité des cyclistes, le quotidien souhaite-t-il dissuader les urbains d’adopter un mode de transport souple, silencieux, économe en espace et en énergie, et finalement beaucoup moins dangereux qu’on ne le pense généralement.
Rappelons qu’en agglomération, le risque d’accident grave est pour un piéton, légèrement inférieur (0,8) à celui de l’automobiliste (1) ; pour un cycliste, il est légèrement supérieur (1,5) ; le risque est par contre très largement supérieur pour un cyclomotoriste (15) ou un motocycliste (50).
On lira ci-dessous l’entretien paru dans La Voix du Nord le 8 novembre 2006, suivi de la réponse de l’ADAV.
Que pensez-vous de ces nouvelles pistes cyclables à contresens, en centre-ville ?
« Tout ce qui touche à la sécurité routière doit être encouragé. Mais je m’interroge sur un contresens vélo, le soir, dans une rue étroite, humide et peu éclairée. Imaginez en plus une voiture mal garée, le cycliste qui doit faire un écart et un camion arrivant en sens inverse. On risque vraiment des pépins. »
Qu’aurait-il fallu faire ?
« Peut-être que ceux qui ont décidé la création de ces voies ont raison. Mais nous, on s’étonne toujours en voyant cela. Je pense que ce type d’aménagement mérite d’abord une grande étude, des simulations, à vélo, à moto, de jour, de nuit, par temps sec ou de pluie, en fonction de la largeur de chaque rue. Après, on ouvre ces voies si on a des garanties totales de sécurité. »
Quelle est la part des cyclistes impliqués dans un accident de la route ?
« En ville, plus de la moitié des accidents impliquent des deux-roues. La traumatologie, l’accidentologie restent la première cause de mortalité des jeunes adultes et ados, en deux-roues et à pied. »
« L’ADAV souhaite réagir aux propos de M. Goldstein parus dans l’édition du mercredi 8 novembre sur les contresens cyclables et s’interroge sur les attaques régulières dont font l’objet les contresens cyclables dans les colonnes de La Voix du Nord.
Cet aménagement est pourtant très sûr et toutes les analyses d’accidents montrent que le risque de collision frontale - où le cycliste à contresens heurte de front le véhicule venant en face - est quasi nul. Les usagers se voient mutuellement en se croisant et ralentissent. Au besoin l’un des usagers s’arrête pour laisser passer l’autre comme dans toute rue étroite à double sens dont la largeur ne permet pas le croisement de deux véhicules en mouvement.
La métropole lilloise compte une soixantaine de contresens cyclables, et les premières réalisations remontent à une dizaine d’années ; aucun accident grave n’a pu être constaté depuis leur mise en service. De l’ensemble des aménagements cyclables c’est celui qui apparaît comme le plus sûr.
L’implantation d’un contresens cyclable se fait toujours suite à une étude approfondie des services communautaires prenant en compte la largeur de la voie, le volume et la vitesse du trafic automobile. Les normes définies par les services communautaires pour autoriser la circulation des cycles à contresens sont d’ ailleurs bien plus restrictives que celles préconisées par le Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques (CERTU) du Ministère de L’Equipement, des Transports et du Logement.
Les pays d’Europe du Nord, précurseurs en matière de sécurité routière, ne s’y sont pas trompés et ont tous adopté et généralisés cet aménagement. C’est le cas notamment chez nos voisins belges où la législation fédérale oblige les villes à installer des contresens cyclables dans l’ensemble des sens uniques dont la voirie est supérieure ou égale à 3 m ! Là encore les analyses accident démontrent qu’il s’agit d’un aménagement très sûr. Bruxelles qui compte peu d’aménagements cyclables et une pratique cycliste similaire à celle de notre métropole généralise ainsi les contresens cyclables. C’est également le cas de nombreuses villes françaises comme Strasbourg, Bordeaux, Nantes, Rennes, Paris, Albertville... ici encore sans constatation d’accidents alors que les normes adoptées pour ouvrir les voies à double sens pour les cyclistes sont moins restrictives que sur le territoire de LMCU.
Cet aménagement est enfin encouragé par le Club des Villes Cyclables et la Ligue contre la Violence Routière.
Par ailleurs, Monsieur Goldstein fait l’amalgame entre deux-roues motorisés et vélos. Le risque d’accidents pour un cycliste est pourtant sans commune mesure avec celui d’un deux-roues motorisé. En France, les cyclistes représentent environ 4% des déplacements, 4% des blessés graves, et 3% des tués ; les deux-roues motorisés représentent 2% des déplacements, mais 30% des blessés et 21% des tués : rien à voir avec le vélo !
Il préconise également de tester l’aménagement à moto, alors que chacun sait que les contresens cyclables sont interdits aux deux-roues motorisés !
L’ADAV souhaite enfin rappeler qu’elle a édité une plaquette d’information « Le bon sens des contresens » sur le bon usage du contresens cyclable avec le soutien des Villes de Lille et Tourcoing, de LMCU et de la Sécurité Routière. Aussi nous invitons La Voix du Nord à communiquer sur ce dépliant pédagogique plutôt qu’à relayer des polémiques non fondées. »