Alors que le vélo peut être considéré comme un outil d’émancipation par la liberté de déplacement qu’il offre à ses usagers, dans la plupart des villes du monde, les femmes sont encore moins nombreuses que les hommes à l’utiliser. Face à ce constat, l’équipe de Copenhagenize France et Cécile d’Aubigny, étudiante à Sciences Po Lille, ont décidé de mener une étude afin de comprendre l’influence de l’espace urbain sur le choix de la pratique du vélo comme moyen de transport du quotidien. En 2019 et 2020, des recherches sur le contexte local, un sondage auprès de 950 habitantes de la métropole de Lille et un entretien collectif regroupant une vingtaine de femmes ont été réalisés.
L’insécurité physique, principal risque projeté par les femmes avant de réaliser un trajet à vélo. L’insécurité physique (forte circulation, manque d’infrastructures sécurisantes, trop faible éclairage) est le facteur qui dissuade le plus les femmes de faire du vélo. Elles sont 61 % à « toujours / souvent » craindre un risque d’accident. Le deuxième facteur significatif de risque est la crainte d’interactions négatives avec d’autres utilisateurs de la route ou la peur d’un harcèlement. Les femmes interrogées sont 35 % à « toujours/souvent » considérer ce risque avant de prendre leur vélo. Il est toutefois intéressant de noter qu’à chaque fois que le trajet est réalisé en groupe, ces risques diminuent significativement.
Les raisons d’évitement d’un itinéraire selon les cyclistes débutantes ou expérimentées. Quelles soient cyclistes débutantes ou expérimentées, elles expriment principalement éviter certains itinéraires en raison d’une insuffisance de l’éclairage public. Par ailleurs, alors que les débutantes sont plus affectées par la densité du trafic motorisé, les utilisatrices expérimentées sont plus sensibles au potentiel risque de mauvaises interactions physiques ou verbales et choisissent de modifier leur itinéraire en conséquence.
Les femmes ayant des enfants réalisent des chaînes de déplacement plus complexes. La principale différence de mobilité entre les femmes ayant ou non des enfants à charge est la complexité de leurs chaînes de déplacements quotidiens. De fait, près de ¾ des mères qui ont un ou plusieurs enfants ont à réaliser durant la journée, un trajet qui concerne l’accompagnement des enfants, en plus du trajet vers le travail.
Un besoin d’infrastructures cyclables sécurisées. Au cours de l’entretien collectif, un exercice a consisté à classer les infrastructures cyclables selon leur confort. Les femmes présentes ont unanimement choisi la piste cyclable séparée et unidirectionelle comme étant la plus confortable à leurs yeux. En comparaison, la bande cyclable à contresens de la circulation motorisée, même dans une rue calme, a été jugée l’infrastructure la plus inconfortable et 23 % des participantes ont même déclaré ne pas vouloir y circuler. Cette infrastructure a, pourtant, été la plus développé en France ces dernières années, car elle est peu coûteuse et n’implique pas, la plupart du temps, de retirer de l’espace aux voitures. Malheureusement, ce n’est pas celle qui répond aux besoins des usagers.
En ce qui concerne les itinéraires cyclables à travers les parcs, même s’ils ont été identifiés comme étant les plus appréciés par les femmes, certaines participantes ont dit les éviter lors des trajets de nuit. Sans éclairage adéquat, alors qu’un itinéraire au sein d’un espace vert s’avère agréable de jour, il devient inconfortable et peu générer des craintes la nuit.
Les résultats complets de l’étude sont disponibles en anglais et en français sur le site Internet copenhagenize.eu.
Cécile d’Aubigny, Clotilde Imbert et l’équipe de Copenhagenize France