Yves Maerten nous a quitté fin 2021
Cycliste du quotidien, membre du CA plusieurs années et surtout ancien Président de l’ADAV entre 2002 et 2004, il avait notamment organisé la fête des 20 ans de l’ADAV, initié les premières démarches en faveur du vélo dans des Plans de mobilité entreprise ou encore permis aux personnes à mobilité réduite de profiter du plaisir et de la liberté de circuler à vélo en se faisant subventionner l’achat de vélos-monopousseurs qui permettent d’atteler un fauteuil roulant à un cycle.
Au-delà de son implication au sein de l’ADAV, Yves était un passionné du tourisme industriel. A ce titre, il sillonnait inlassablement la région et ses nombreuses friches issues des activités du textile et du charbon, le tout, naturellement, à vélo et quand il le fallait, en intermodalité avec le TER !
Expert dans son domaine, il avait réalisé l’inventaire des cheminées qui marquent encore le paysage de notre région. Guide-conférencier pour les offices du Tourisme de Lille et de Lens-Liévin, il avait aussi initié les premières visites touristiques à vélo et en Segway, formes de visites alors pour le moins originales.
Toutes nos pensées à sa famille, ses enfants et petits-enfants dont il était si fier.
Michel Anceau et Olivier Dutel.
Poésies en son hommage :
À supposer que l’on me demande une définition globale de l’humanité
me viendrait une réponse paradoxale :
pour trait commun nous sommes tous d’une singulière singularité
ce qu’ayant posé je nuancerais à la façon douce-amère de Coluche
(« il y en a qui sont plus égaux que les autres »)
oui : je penserais alors à deux ou trois êtres
radicalement plus phénoménaux que nous autres phénomènes ordinaires
tiens par exemple
je me souviens de quelqu’un que j’ai interrogé un jour
car il était le seul au monde à faire un truc pareil :
« Comment en es-tu arrivé à répertorier à vélo
toutes les cheminées d’usines de Fourmies à Zuydcoote ?
Et pourquoi (encore à vélo), arpentes-tu la ville,
y compris sous les giboulées,
pour distribuer sans retard la gazette des cyclistes ? »
le même à qui encore
ayant vu une aquarelle fulgurante de sa main
j’ai dit une autre fois :
« Bizarre que tu ne sois pas fichu de tenir un tournevis :
bon sang tu dessines, tu peins si bien ! »
etc. chaque question à ce champion cet érudit
me valant une réponse de modestie désarmante
(sauf au chapitre de la vaisselle
qu’il se vantait de faire reluire sans eau)
comme quoi il s’efforçait simplement de bien faire dans la vie
même s’il n’y connaissait pas grand chose
— en poésie non plus d’ailleurs
s’est-il excusé une après-midi de randonnée oulipienne
(à vélo toujours à vélo)
sur un chemin de halage — avant de nous lire ce qu’il avait composé
ceci :
L’eau de l’Escaut est grise
Plouf !
L’eau de l’Escaut dégrise
puis cela :
Que sont devenus les haleurs, halant de leur pas lent
les péniches, les bélandres, les gabarres ?
De nos jours, les haleurs s’en sont allés,
au loin des chemins de halage,
ahanant leur tristesse de n’être plus haleurs,
sans allant, à l’heure des grands convois motorisés.
C’est bien la fin des bricoleurs.
et moi époustouflé recueillant ces poèmes
non signés va sans dire
mais je me souviens aucun doute c’était Yves
Robert Rapilly
Post-scriptum
La bicyclette selon Yves
est l’exacte école du vent
où toutes choses relatives
planent en danseuse souvent.
Moulinant dans la giboulée
la mécanique à ses genoux
ralliera chaque cheminée
d’un inventaire — lui pour nous !
Au noroît tantôt qu’il dépasse,
ce doux champion tient scrupule au
principe que vite la trace
s’estompe où fila son vélo.
La vitesse en suspens l’enivre,
nous pleurons de ne pouvoir suivre.
Robert Rapilly