Cet été, les premiers tourne-à-droite aux feux tricolores destinés aux cyclistes (appelés aussi « Cédez-le-passage cycliste au feu ») vont être mis en service à Lille. Depuis 2012, de nombreuses villes ont déjà équipé des carrefours de ce dispositif : Strasbourg, Bordeaux, Toulouse, Dijon, Valence, Quimper, Dunkerque...
En présence des panneaux réglementaires, il sera possible au cycliste de tourner à droite au feu rouge, ou de continuer tout droit (carrefours en T).
Cette disposition est rendue possible par un article du décret n° 2010-1390 du 12 novembre 2010 :
Art. 18. - L’article R. 415-15 est remplacé par les dispositions suivantes :
Art. R. 415-15. - Aux intersections, l’autorité investie du pouvoir de police peut décider de : |
Ces tourne-à-droite seront installés sur deux grands axes (Faubourg de Béthune – Saint-Maurice-Pellevoisin dans un premier temps (inauguration le 18 septembre) , puis Bois-Blancs – Fives), point sur lequel Droit au vélo avait insisté pour une meilleure lisibilité du dispositif, tant pour les cyclistes que pour les automobilistes.
Évidemment, de nombreux grincheux vont s’indigner : « Les cyclistes ne respectent rien ; déjà qu’ils avaient le droit de prendre les sens interdits, maintenant, ils vont pouvoir griller les feux, c’est vraiment du grand n’importe quoi !... ».
Précisons donc qu’il ne s’agit pas de griller les feux rouges : le cycliste doit céder le passage aux piétons et véhicules passant au vert.
Rappelons aussi les points suivants :
– Les sens interdits ont pour la plupart été installés pour permettre une plus grande vitesse des véhicules ainsi que leur stationnement sur la chaussée ; premiers pénalisés : les cyclistes (insécurité, allongement du trajet).
– Les feux tricolores permettent de réguler le trafic, certes, mais aussi d’autoriser des vitesses excessives (vert : je fonce !). Là aussi, le cycliste est lésé : arrêts fréquents, mise en danger aux intersections. Pour mémoire, au début du xxe siècle, la vitesse des véhicules était à Lille limitée à 12 km/h (!), et même les coureurs du Tour de France qui traversaient la ville lors de l’étape Metz-Dunkerque devaient s’y conformer !
Les mesures récentes (double-sens cyclable systématique dans les zones 30, tourne-à-droite) ne constituent donc pas un privilège accordé aux cyclistes, mais plutôt le début d’une reconquête. Contrairement aux idées reçues, elles ne sont pas dangereuses, mais, en favorisant davantage les déplacements à vélo, contribuent à une circulation urbaine plus apaisée.
Télécharger le document « Le nouveau Cédez-le-passage pour les cyclistes au feu rouge » édité par Lille Métropole.
Ce document est aussi disponible en version papier au local de l’association, 23 rue Gosselet.
http://www.lillemetropole.fr/cms/home/actualites/transports-mobilite/panneau-cedez-le-passage-cyclist.html
http://www.vlille.fr/fr/le-nouveau-cedez-le-passage.aspx
On pourra aussi consulter la fiche « Cédez-le-passage cycliste
au feu rouge » éditée par le CERTU en décembre 2012.
Revue de presse
Lille : en août, les cyclistes seront dispensés de feux rouges sur de nombreux carrefours – La Voix du Nord - 11 juillet 2013
Lille : les cyclistes vont pouvoir griller les feux rouges – Metronews - 16 septembre 2013
Grillez, cyclistes ! – Nord-Éclair - 19 septembre 2013
Le droit de réponse de Droit au vélo à ce dernier article :
Dans son article paru dans Nord Éclair le 19 septembre dernier intitulé « Grillez, cyclistes ! », Vincent Décaudin fait preuve d’un « Auto-Centrisme » qui considère l’automobile comme un droit et, comme dangereux, tout ce qui viendrait limiter son usage. Pourtant, la voiture en ville est source de problèmes en terme d’engorgement, de dangerosité, de pollution et de dégradation du cadre de vie.
Pour résoudre ces problèmes, Lille métropole a fixé une proportion de 10 % de déplacement à vélo à l’horizon 2020, proportion vers laquelle nous nous rapprochons peu à peu. Cette augmentation de la place du vélo permet d’apaiser la ville, de réduire les gaz à effet de serre, et d’améliorer la santé de la population.
Cela est en grande partie le résultat du développement des aménagements cyclables sur le métropole Lilloise : bandes, pistes, doubles sens cyclables, couloirs bus-vélos, zones de circulation apaisées (zones des rencontres, zones 30), arceaux pour le stationnement... plus il y a d’infrastructures cyclables, plus il y a de vélos, moins il y a de voitures et plus les déplacements des cyclistes et des piétons sont sûrs.
L’autorisation conditionnelle de passer au feu rouge (l’équivalent d’une balise) n’est pas le fait d’un établissement public mais le fait de la loi (article R. 415-15 du code de la route). Le maire, dans le cadre de ses pouvoirs de police, peut décider de mettre en œuvre cette possibilité à certains carrefours.
En outre, tout comme les doubles sens cyclables, le Cédez-le-passage cycliste au feu rouge permet de faciliter la circulation de ces usagers en leur évitant des arrêts pénalisants (perte de temps, redémarrage pénible), tout en satisfaisant pleinement aux exigences de sécurité de la circulation pour tous les utilisateurs de la voirie. Le vélo présente des caractéristiques particulières qui rendent possible cette nouvelle mesure:la position avancée du cycliste en carrefour permise par le faible gabarit du vélo et sa vitesse d’approche modérée lui offrent une visibilité souvent bien meilleure que celle dont disposent les automobilistes. En outre, ses faibles dimensions lui permettent une meilleure réinsertion dans le trafic une fois le feu franchi. Enfin, le Cédez-le-passage cycliste au feu rouge permet également au cycliste d’éviter de rester à l’arrêt dans les angles morts des camions (en milieu urbain, les accidents entre poids lourds et cyclistes sont responsables de 20% des accidents graves ou mortels impliquant un cycliste).
Le Cédez-le-passage cycliste au feu rouge existe depuis plusieurs décennies en Allemagne et aux Pays-Bas. Il a été testé dans plusieurs villes françaises ( Strasbourg, Bordeaux et Nantes...). Il n’y a eu aucun accident (ni avec un autre véhicule, ni avec un piéton) ; en outre, il n’y a eu aucune incidence négative sur le respect du feu pour les autres mouvements ou aux autres carrefours.
Enfin, de manière plus générale,comme l’indiquent les chiffres de la sécurité routière, se déplacer à vélo n’est pas plus dangereux qu’en utilisant un autre moyen de transport.
Yannick PAILLARD
Association Droit au vélo